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Olivier Pahud

Avoir à être

Si le béton ne résiste pas au marteau-piqueur, comprenons que nos murs les plus solides sont d’abord dans notre propre tête.



Chers amis,


En ce premier août « national », je prends trop traditionnellement la plume. Notre « Confédération » ne fête pas sa 732e année, mensonges… Il serait temps de faire une croix sur notre drapeau !


Le premier premier août ne fut fêté qu’en 1891, pour célébrer non la création de notre pays, mais les 600 ans d’un pacte parmi d’autres convenu « dans les premiers jours du mois d’août » de 1291. L’idée d’une « fête nationale » n’est venue que des années plus tard encore, sous la pression des Suisses de l’étranger qui souhaitaient leur propre date à revendiquer, alors que la France s’épanchait en réjouissances le 14 juillet depuis 1880. Ce n’est qu’en 1993, au terme d’une votation gagnée d’une majorité historique, que ce jour devint jour férié officiel.


S’il m’est donné un souhait pour ce jour de fête, c’est que ce premier août soit aussi le dernier. Et que les derniers deviennent nos premiers. Dans le pays au drapeau carré, ça ne tourne pas rond. Blanc sur rouge, rien ne bouge, comme on se le répète chez les vaudois.


Les traditions nous réjouissent, nous font adhérer aux idées qui ne sont pas nôtres ; si ceci peut parfois être souhaitable, il n’en reste pas moins notre devoir de souveraineté citoyenne. Au-delà des considérations patriotiques, nous restons humbles passagers de la Terre, la seule et plus belle planète qu’il nous est donné de connaître pour l’heure dans l’Univers.


Loin de vouloir critiquer la Suisse stérilement, en rappelant pour l’exemple l’affaire Crypto AG, le délitement soudain de notre neutralité ou encore l’avancée quasi militaire de la 5G, le propos tient plus à amorcer la dynamique qui entreprendra la recherche de nouveaux lauriers plutôt que le repos permanent sur nos anciens. Ce ne doit être nos gouvernants qui nous dirigent, mais nous qui dirigeons nos gouvernants. Le statu quo ne suffit plus au terrien conscient. Il nous importe désormais de forger nous-mêmes notre réalité en dépassant les murs qui nous retiennent encore.


Traverser les murs est un vieux fantasme de magicien. Si David Copperfield a en son temps passé au travers de la grande muraille de Chine, la physique nous apprend qu’il y a tant d’espace entre particules qu’a priori la matière pourrait passer au travers de la matière… Pour résoudre plus rapidement l’équation, rappelons-nous que la nature nous affranchit des murs en nous ouvrant ses bras infinis. Alors que l’homme a gravi tous les sommets, il arrive pourtant à s’enfermer dans une cellule si petite pour sa vie. Les murs qui nous retiennent ne sont le fait que de nos propres constructions ; le vivant, lui, nous accueille sans limites.


Si le béton ne résiste pas au marteau-piqueur, comprenons que nos murs les plus solides sont d’abord dans notre propre tête. Quel outil viendra à bout de ces prisons invisibles ? Que nous faudra-t-il pour sortir du carré de notre drapeau ? Par quel moyen saura-t-on dépasser le connu, qui trop souvent nous est imposé sans même notre consentement ?


Notre civilisation vit des moments proprement historiques. Nos technologies, nos structures sociales, nous offrent une liberté sans précédent. L’accès au savoir s’est glissé dans la paume d’une seule main. Nous avons véritablement « une Ferrari dans le garage », mais nous continuons d’aller à pied. Sans vouloir être l’apôtre de la technologie, ne serait-il pas judicieux d’en faire, puisque disponible à chacun, un usage éclairé ?


Longtemps, il nous fallait avoir ; enfin, nous pouvons être. Notre société, dans un jalon historique, est en train de passer de l’avoir à l’être. On ne peut avoir toujours plus, mais on peut être toujours plus. On risque toujours d’avoir moins, mais on ne risque jamais d’être moins. Il faudra avoir tout eu pour qu’enfin notre être se réveille. Ce changement profond de notre vie peut s’accompagner consciemment dès maintenant. Si chaque jour peut être le dernier, chaque jour peut aussi être le premier. Mûrs enfin pour abattre nos murs si fins, n’être enfin que pour naître enfin.


Être plus qu’avoir, c’est permettre à la vie de vivre enfin. Elle peut s’éveiller en un seul instant, à tout instant. Nous n’avons pas une âme, nous sommes une âme. Si la différence est si minime à l’écrit, la conséquence est de taille dans nos vies.


Plus qu’avoir un pays, être un pays. Plus qu’avoir une terre, être la terre. Plus qu’avoir la paix, être la paix. Plus qu’avoir la vie, être la vie.


Si nous avons encore des murs, il nous suffit désormais d’être de l’autre côté. Le carré de notre drapeau ne doit pas enfermer nos pensées. Il est temps de poser notre croix et de repartir plus léger, d’être l’être que nous sommes vraiment, tremplin à l’âme, âme à temps plein. Si nous avons su faire rayonner l’entraide dans tous les coins de notre globe, imaginons ce que nous pouvons apporter encore à ce monde en prêchant par l’exemple.


Je nous souhaite donc que ce premier août que nous avons soit le dernier. Soyons la fête, au quotidien. À chaque jour qui est fait, riez ! Soyons la joie, soyons la vie, nous sommes les seuls fossoyeurs de notre liberté, aujourd’hui plus que jamais. Ce qui seul est compliqué, c’est que tout est simple. En ce jour, tout ce que nous avons, c’est à être.

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