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  • Olivier Pahud

Exposer la vérité

Notre démocratie se meurt dans le silence des vérités dont on ne parle pas. Jusqu’à quand ?

Notre démocratie est complexe et fragile. La monarchie ou encore la dictature sont bien plus simples à implémenter, mais n’offrent pas les avantages de l’expérience que nous vivons. Le risque de la démocratie, si une participation de la population n’est pas suffisante, est justement de tomber dans un despotisme qui ne dirait pas son nom.


Décourager le citoyen d’agir au moyen de labyrinthes administratifs ou juridiques, empêcher l’accès au porte-voix des médias, discréditer ceux qui en émergent quand même, réduire le message des manifestations au nombre de participants, voilà qui ruine l’essence de notre Constitution. « Même dans le cas de la minorité d’un seul, la vérité est la vérité » a dit Gandhi en son temps.


Oui, la vérité s’est noyée sous les reflets du vernis éblouissant de notre « meilleure démocratie du monde ». Au prétexte de représenter le peuple, les politiciens se sont cooptés. Au prétexte d’être indépendante, la justice s’est renfermée sur elle-même. Au prétexte d’être un quatrième pouvoir, la presse s’est endormie sur ses lauriers. Les minorités ont été étouffées, broyées, divisées, au point d’en devenir une majorité éparse, désintéressée. Petit à petit, s’est installé le règne glaçant de la loi du silence.


Imaginez un monde où les oiseaux ne chantent plus. Séparés, cloisonnés, ils ont renoncé à ce simple fait de vie, communiquer. Ceux qui feraient trop de bruit encore seraient chassés, tirés, discriminés. Nous en sommes là. Notre démocratie se meurt dans le silence des vérités dont on ne parle pas.


Une illustration récente, le cas « Darius ». Le « gendre idéal » a pu couler douce carrière comme présentateur vedette à la télévision romande pendant plus de 20 ans, élevé même « Chevalier des Arts et des Lettres » en 2011. Il aura fallu attendre son départ à Paris pour qu’enfin, une vérité plus sombre apparaisse à la lumière : toutes ces années, impunément, Docteur Darius était aussi Mystère Rochebin.


C’est le journal « Le Temps » qui, fin octobre 2020, révèle l’affaire après une enquête en, pour une fois, bonne et due forme. Le cas semble de loin être isolé. Le « Dariusgate » n’est que la tête de turc, décapitée, de ce qui paraît être une culture d’entreprise qui dure depuis au moins 20 ans au sein de la télé d’Etat. Les seuls efforts consentis par sa direction auront été de tout faire pour toujours prétendre « tomber des nues », ce qui en soit est assez cocasse dans la formulation.


Car si la presse écrite romande peut trouver un intérêt commun à partir en guerre contre le « service public », mandat rappelons-le accordé à une association, c’est de Paris que s’approfondit l’enquête, dans le silence entendu de nos médias : « La Radio-Télévision suisse entre pédophilie, harcèlement et mensonge » titrait un journal français le 8 janvier à propos de notre lucarne. L’article, signé notamment du multi-docteur Idriss Aberkane, souligne non seulement le caractère pédophile de nombres d’abus à la RTS, ou bien la tactique de la direction de la surprise feinte à chaque dénonciation, mais encore le fait que « tout le monde savait ». Nettoyage du web, discrimination, censure, silence, voire paiement direct confidentiel comme pour Jorge Resende, tous les moyens sont bons pour tenir le couvercle sur une marmite bouillonnante.


Et c’est bien là que prennent les racines du cancer de notre « meilleure démocratie » : tout le monde sait, mais personne ne parle. Par confort, par crainte, par paresse, par menace, par corruption, ou encore parce que « cela ne changera rien ». Ce n’est pas que notre télé qui en est malade, mais nombre de nos administrations, nos tribunaux, nos entreprises, nos politiques, nos représentants. La loi du silence, celle qui nulle part n’est écrite mais partout appliquée, a depuis trop longtemps surpassé dans la hiérarchie des normes légales notre Constitution. L’autocratie d’une élite s’est imposée à nous, presque sans surprise, presque sans réaction du citoyen. Jusqu’à quand ?

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