Dynamisons, stimulons, récompensons plutôt que de perfuser à perte. Je voterai non au train de mesures en faveur des médias. En revanche, je suis pour mettre en place bourses et récompenses pour des informateurs méritants et engagés.
Les braves Suisses, après avoir dû se soumettre à la redevance annuelle relevant presque de la « dictature », tant elle étrangle les personnes à petits revenus, doivent se prononcer à présent pour aider la presse dite « mainstream ». Le mérite-t-elle vraiment ?
La majorité des articles qu’on y trouve proviennent d’agences de presse, dont on retrouve souvent mot pour mot le narratif dans l’un ou l’autre journal. Reste un travail rédactionnel, trop souvent de surface, souvent mal payée, réalisé par des journalistes qui craignent plus pour leur avenir que pour leur éthique. Les seules « affaires » qui sortent sentent généralement fort le pilotage politique. Nous sommes tombés bien bas, mais comment a-t-on pu en arriver là ?
La presse, ce « quatrième pouvoir », s’est retrouvée en situation de concurrence déloyale, d’abord avec la télévision, puis avec Internet, dont les « GAFA » siphonnent la manne des annonceurs, sans parler de la « presse gratuite » étalant son prêt-à-penser à une génération qui n’a plus le temps. L’orphelin, c’est le labeur journalistique de fond, l’enquête qui permet la réflexion, l’exploration des faits sur le terrain. L’intelligence en est la première victime.
Ainsi, le modèle d’affaire de ce quatrième pouvoir se délite depuis maintenant des décennies, au point que nous en soyons acculés à devoir choisir entre sa subvention par le « premier pouvoir » ou sa disparition annoncée, dans les faits presque déjà effective. De mon point de vue, plutôt que de l’acharnement thérapeutique, c’est de renouveau que le pilier de l’information a besoin, et urgemment !
Car oui, pouvoir s’informer est essentiel. Si je suis abonné a des quotidiens de gauche comme de droite, locaux comme internationaux, je privilégie encore et toujours le journalisme alternatif, celui qui ne vit jamais de la publicité, celui que l’on voudrait volontiers faire taire, en le dénigrant, en le censurant, en l’ignorant. Là se niche pourtant des perles stimulantes pour la pensée, des points de vue différents qui nous amènent à revoir parfois les partis-pris trop facilement avalés d’une majorité trop pressée.
Rongés par ce vice, nous vivons dans une société qui ne lit plus, qui ne débat plus, qui ne réfléchit plus. Emprisonné dans un esclavagisme moderne, notre instinct de survie nous pousse à accepter moult acrobaties intellectuelles pour nous donner bonne conscience. La « bien-pensance » domine, sans risque qu’elle se voit remise à un moment ou un autre en question. C’est pourtant une urgence à laquelle nous devons nous confronter.
Les votations ont de ceci qu’elles n’offrent qu’un choix binaire, sans autre alternative. Refuser le train de mesures en faveur des médias, c’est précipiter un modèle d’affaires obsolète qui n’a pas su se réinventer à temps. L’accepter, c’est maintenir le statu quo d’une médiocrité incapable de se désembourber. Triste choix qui nous est offert, semblable à la difficile décision de « débrancher » un mourant.
Où se terrent les élus capables de proposer un renouveau médiatique ? Qui est animé du courage de prendre le taureau par les cornes ? C’est aujourd’hui le citoyen, souvent à titre bénévole, qui informe ses semblables, en particulier quand la presse entendue désinforme par omission, son plus grand travers. Curieux de tout, je scrute autant les médias que les réseaux sociaux, à l’écoute de l’autre et de son message. Mon constat est que le fossé s’agrandit, entre vérités du terrain et dogmes cathodiques. J’en pleure pour notre démocratie agonisante…
Les solutions existent, pour autant qu’on veuille bien se donner la peine de les chercher. Si l’information nécessite un soutien financier, si le journalisme réclame la subvention, cette manne ne doit pas être l’oreiller de paresse d’un mourant en fin de vie. Elle doit au contraire servir à stimuler, à réanimer, à redonner vie à une corporation dont l’indépendance et les moyens méritent d’être à la hauteur de la tâche qu’on attend d’elle, être un véritable « quatrième pouvoir ».
Dynamisons, stimulons, récompensons plutôt que de perfuser à perte. Le journalisme de fond est déjà mort, ne reste que les « brèves de presse » qui survivent encore, sans goût, sans substance. Nous avons l’opportunité sans précédent de réinventer notre société, tout particulièrement au moyen de l’huile essentielle de l’information qui doit circuler avec fluidité dans nos engrenages sociaux.
Je voterai non au train de mesures en faveur des médias. En revanche, je suis pour mettre en place bourses et récompenses pour des informateurs méritants et engagés, selon un modèle qui reste certes à inventer, à expérimenter, à peaufiner, mais qui est largement plus prometteur pour une société renouvelée que la platitude du mainstream proposé.
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