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  • Olivier Pahud

Si prévisible crash

Dernière mise à jour : 18 mars 2023

Je dénonce l’incapacité prévisible des candidats en lice à prendre par les cornes les vrais problèmes et à leur trouver des solutions.

« Examiner la réalité du foyer de Mancy, c’est prendre conscience de l’aspect multifactoriel des causes des dysfonctionnements qui ont été relevés. Un élément pris isolément ne saurait en effet à lui seul expliquer le tourment qui traverse la structure. C’est bien une succession, un cumul même de manquements à diverses strates de l’administration qui ont permis la survenue de dysfonctionnements et de maltraitance. » Cet effrayant constat est issu du rapport d’analyse externe sur les dysfonctionnements et la maltraitance au foyer de Mancy, rendu public en mars 2022.


Pire encore que le rapport lui-même, c’est de constater que les diverses dénonciations ne sont que le fruit du dépôt d’une plainte pénale et d’une surmédiatisation du cas. Plus terrifiant encore, la réponse donnée par Mme Emery-Torracinta, Conseillère d’Etat en charge du dossier : passer la patate chaude à une fondation, sans même un mea culpa. Sans introspection profonde des services d’Etat, la même situation se reproduira inévitablement, se produit déjà dans maintes structures dont le malheur n’a pas encore fait le beurre des journalistes.


Pourtant, en novembre 2010 déjà, deux syndicats genevois publiaient « Le Livre Noir », une analyse non exhaustive des conditions de travail au Service de Protection des Mineurs (SPMI). Soigneusement ignoré des médias, inconnus des politiques, ce document pourtant librement accessible peint un bien sombre tableau des dysfonctionnements au sein de services étatiques des plus sensibles. Tant qu’il n’est pas concerné, si mal informé, le citoyen n’en a cure. Soudainement touché, il découvre sans soutien la triste réalité des horreurs de la République.


La Suisse a dû compenser déjà, bien trop maigrement, les victimes des « internements administratifs », pratique inhumaine qui a duré plus de 50 ans dans « la plus belle démocratie du monde » et a concerné au moins 60'000 personnes. À Genève, les « hospitalisations sociales », pratique des plus indécentes qui consistait à hospitaliser abruptement des centaines d’enfants bien-portants durant des mois par manque de places en foyer, vient enfin d’être restreinte à Genève il y a à peine une année. Il n’y a par contre aucune visibilité sur la mise en œuvre de l’interdiction, ni sur les alternatives concrètes. Mme Emery-Torracinta peut se retirer sur ses deux oreilles, avec la satisfaction du travail inaccompli, cajolée par une presse complice et complaisante. L’image est sauve, pas les mineurs.


« La force de la communauté se mesure au bien-être du plus faible de ses membres » rappelle en préambule notre « Sainte Constitution ». « Les enfants et les jeunes ont droit à une protection particulière de leur intégrité et à l’encouragement de leur développement » y lit-on encore à l’article 11 de l’immaculé papier. « L’enfant est protégé contre toute forme de maltraitance » surabonde notre fraîche version genevoise d’une constitution dont aucun candidat ne se soucie. Après « servir et diparaître », se faire élire et disparaître est le nouveau mantra inauguré par la verte pâle candidate Fabienne Fischer.


L’industrie de l’aviation, vieille d’a peine un siècle, a su développer « la tolérance à l’erreur » : partant que personne n’est infaillible, une seule mauvaise décision ne doit pas conduire à la catastrophe. Tous les drames aériens sont le résultat pas d’un mais d’une succession de mauvais choix. Chaque accident, incident même, est minutieusement étudié dans un rapport, souvent rédigé par une équipe internationale et pluridisciplinaire, non pas pour pointer les coupables, mais pour que l’expérience ne se reproduise jamais. Les rapports émettent des recommandations, le plus souvent impératives, qui visent à améliorer immédiatement et définitivement la sécurité des usagers. C’est ainsi que cette industrie est devenue la plus sûre du monde. À quand, sur ce même modèle, une introspection résiliente de l’Etat ?


À la différence de cette industrie, soumise à la concurrence féroce et à la surexposition médiatique en cas de défaillance, notre divin Etat abuse de sa position monopolistique. Ne souffrant jamais du risque de disparition, soutenu d’un accès au crédit facilité pour ne pas dire illimité, notre construction fédérale n’a aucun compte à rendre, aucun besoin de résilience, aucune velléité d’amélioration. On ne sacrifie par l’opprobre des médias que les opposants à la doctrine de la médiocrité permanente et inamovible. La loi sur les cartels ne s’applique pas à ceux qui la décident…


Le peuple souverain, mis en léthargie par une majorité réduite à l’esclavagisme débilisant, est soumis à des partis tenant plus de la secte que de la participation. Leurs « gourous » mû par l’opportunisme plus que le sens du service n’ont cure de la Constitution. À la triste illustration d’un Pierre Maudet, « se servir et disparaître » semble être leur nouveau motto.


Viendra l’heure où l’atterrante médiocrité permanente, où l’anesthésie systématique des consciences confrontées aux dysfonctionnements récurrents, où l’aberration d’un système par avance voué à son incapacité seront suffisamment visibles pour que l’ensemble des citoyens se décident à agir pour endiguer un racket qui ne sert que les nantis. Cette heure ne sonnera qu’avec un effort collectif qui commence par soi-même.


Englués dans nos quotidiens, à la merci d’idéologies qui ne nourrissent que la division, soumis à l’essoreuse fiscale, notre inhumanité s’est installée insidieusement, sans faire le moindre bruit qui dépasse le désert de nos seules et dernières volontés. Les multiples déboires qui nous sont donnés de vivre actuellement suffiront-ils à mettre en lumière la nuit dans laquelle nous nous sommes collectivement endormis ?


Je dénonce l’incapacité prévisible des candidats en lice à prendre par les cornes les vrais problèmes et à leur trouver des solutions pertinentes, efficaces et efficientes, comme l’exige la Constitution genevoise. Ma postulation au plus haut poste du canton, frappée trop facilement d’atypisme, n’est que l’émergence d’un jour nouveau de notre brillant avenir, pour autant qu’il soit voulu et collectif. Les erreurs passées, dont l’affligeant barouf du foyer de Mancy n’est que pointe d’iceberg, sont l’occasion de nous réinventer sans plus attendre.

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