Le tout et le rien, poussière d'un vieux soleil, grain de folle plénitude, il veille et éveille, l’homme éveillé.
Tant de fois il sait, si souvent il se tait, l’homme éveillé.
Il chante en son cœur, des paradis sans paroles, il peint en son âme des jardins sans contours.
Il comprend qu’il est incompris, il entend qu’il n’est pas entendu, il accepte qu’il ne soit pas accepté.
D'une patience infinie, il s'immerge dans l’amour jaillissant qu’il lui est si difficile de répandre dans le feu qui l'entoure.
Comme le marcheur arrivé avant les autres, le grimpeur ayant atteint premier le sommet, il attend qu’on le rejoigne, chacun à son rythme, dans une béatitude accomplie.
Il murmure aux oreilles qui parfois s'ouvrent à lui, guide l'égaré en demande du chemin, saisit la main qui se tend, toujours sans jugement ni complainte.
Qu’une larme lui coule, il la sublime de tendresse en arrosant avec une graine de senteur, de celle qui inventent les nouvelles couleurs de la vie.
Il rit solitaire de cette joie qui l’inonde, sourit secrètement du bonheur invisible qui le traverse.
L’homme éveillé jette à ses heures des étincelles à la vie, échantillon en reflet de la lumière qui le transcende, espérant ainsi allumer feux de joie et perles d’instants dans les cœurs éphémères.
D’une passion éternelle, il accueille ses souffrances comme offrande à la plume, de celle qui creuse des vallons pour y inscrire des reliefs encore insoupçonnés.
Ses colères sont mesurées, en ténor imposant, lui qui garde le sacré comme pupille de la vie.
Il n’est jamais vraiment seul, l’homme éveillé, habité de l’amour qu’il voit partout en chaque instant, si conscient du voile qui finira par se lever, ce tissu qui rend tant aveugle et qu’on ne peut arracher que doucement.
De son inconditionnel élan qui est sa seule destination, il attend serein que ses compagnons le rejoignent pour le grand océan de notre ensemble.
Il pleure du temps perdu, se réjouit des pas accomplis, dans une intensité qui le rassemble à lui-même.
Comme l’eau frotte le roc, il voit les cœurs de pierre se sculpter au quotidien, par les vagues incessantes d’un amour permanent qui s'infiltre sans relâche.
Il laisse le temps à la grande expérience, appelant à lui d’un chant discret et joyeux les cœurs en route vers le grand nous.
Le tout et le rien, poussière d'un vieux soleil, grain de folle plénitude, il veille et éveille, l’homme éveillé.
Il reçoit tant qu’il donne tout, une richesse qui dépense sans compter.
Il lui reste tant de paradis à conter, tant de jardins à écrire, tant de ciels à fleurir.
Il vit hors des limites et du temps, loin des mots et des regrets, sans le souci du lendemain.
Au cœur du cœur des cœurs en cœur, il est là, l’homme éveillé.
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